C’est fait! Malgré la survie difficile de Kyoto-2 en décembre , malgré les discussions interminables des climato-bureaucrates à Doha qui se regardent la cravate à défaut d’une véritable volonté politique de faire un pas en avant et malgré le retrait officiel du Canada (et du Japon et de la Russie et de la Nouvelle-Zélande!) du protocole de Kyoto, malgré tout cela, le Québec s’est lancé dans la grande aventure d’un marché réglementé du carbone le 1er janvier 2013.
C’est fait! Malgré la survie difficile de Kyoto-2 en décembre , malgré les discussions interminables des climato-bureaucrates à Doha qui se regardent la cravate à défaut d’une véritable volonté politique de faire un pas en avant et malgré le retrait officiel du Canada (et du Japon et de la Russie et de la Nouvelle-Zélande!) du protocole de Kyoto, malgré tout cela, le Québec s’est lancé dans la grande aventure d’un marché réglementé du carbone le 1er janvier 2013.
Kyoto-1 nous aura laissé en héritage un modèle, dont des mécanismes de quantification et de vérification de réductions de GES, efficace pour la gestion de marché réglementé du carbone. Le Québec, propulsé par une volonté politique remontant à 2008 d’investir dans les énergies vertes et appuyée par une économie hydroélectrique, a décidé de sauter à pieds joints dans un marché de carbone réglementé. Par modification des réglementations du 13 décembre dernier, le marché québécois du carbone et ses mécanismes sont en place depuis le 1er janvier 2013.
La mise en place de ce marché régional, le Western Climate Initiative (WCI) avance toujours et ce, contre monts et marées. Pourquoi contre monts et marées? Parce qu’en 2008, le WCI réunissait pas moins de 7 états et 4 provinces et qu’aujourd’hui c’est le Québec qui fait cavalier seul en attendant patiemment que la Californie démarre de son côté. Doit-on parler de folie québécoise ou de vision québécoise? Pour les Solutions Will, le Québec agit en tant que visionnaire, car non seulement le monde est menacé de tempêtes dévastatrices comme Sandy, qui coûtera plus de 25 milliards US aux citoyens et entreprises américaines , mais il doit également trouver une nouvelle façon de générer des retombées économiques alors que l’économie mondiale peine à se relever de sa crise qui perdure depuis 2008.
Le deuxième but du Québec au sein du WCI est de lier son marché à celui de la Californie. Ce regroupement de plusieurs juridictions dans un marché nord-américain a pour objectif de fluidiser les volumes d’offre et de la demande de droits d’émission et de crédits de carbone compensatoires aux bénéfices de toutes les parties prenantes de la société.
Le WCI est un marché régional réglementé du carbone que l’on nomme cap-and-trade, un système de plafonnement et d’échange de droits d’émission (SPEDE). À travers ce marché régional du carbone, le Québec a pour objectif de réduire ses émissions de GES de 20% sous le niveau de 1990 d’ici 2020. Pour atteindre cette cible, le Québec devra réduire ses émissions de 81,7 tonnes métriques de CO2 (MtCO2éq) émises en 2009 à 67,0 MtCO2éq. C’est un objectif très ambitieux pour le Québec car le secteur de l’énergie étant un faible émetteur de CO2 chez nous, il ne pourra pas contribuer de façon significative à la réduction de GES. Il faudra alors aller piger au cœur de l’économie, dans les secteurs industriels et du transport, pour assurer les réductions autant chez les petits que les grands émetteurs de GES.
Fonctionnement
Le fonctionnement du SPEDE du Québec est un peu complexe mais il suit la logique des autres marchés réglementés du carbone. Essentiellement, le gouvernement du Québec distribuera gratuitement et vendra aux enchères des droits d’émissions (ou unités d’émission) à tous les grands émetteurs de GES (plus de 25 000 tonnes de CO2 par site/année). Il y en aurait initialement environ 75 sites au Québec. Chaque unité d’émission autorisera aux entreprises d’émettre une tonne de dioxyde de carbone dans l’atmosphère. Dans les faits, le gouvernement du Québec met en place une valeur sur le carbone.
Graduellement les droits d’émissions disponibles gratuitement pour les GES seront diminués afin de rencontrer les cibles de réductions québécoises qui sont de 20% des GES en 2020 avec l’année 1990 comme référence.
En quelque sorte, les entreprises paieront pour le droit de polluer, donc il y aura en fait une internalisation des coûts environnementaux dans l’économie.. D’autres entreprises trouveront qu’il est plus profitable pour elles d’investir dans de nouvelles technologies afin de réduire leurs émissions de GES plutôt que d’acheter des unités d’émission aux enchères. Si les réductions internes de CO2 d’une entreprise dépassent ses cibles (par exemple à travers une plus grande efficacité énergétique ou encore une substitution d’un carburant), une entreprise pourra alors convertir ses réductions en unités d’émission et échanger ses unités sur le marché du carbone du Québec et éventuellement sur celui du Western Climate Initiative avec d’autres entreprises du Québec et de la Californie.
Raisonnement
Plutôt que d’imposer uniquement une taxe de carbone qui affecte les consommateurs en augmentant les prix et en refilant la note directement aux citoyens, les mécanismes de marché du carbone (SPEDE) encourage l’innovation chez les entreprises afin qu’ils trouvent de nouveaux moyens de réduire leur empreinte de carbone. Il est probable qu’une partie des unités d’émission (crédits de carbone) pourra faire augmenter les prix des biens et services dans les secteurs d’activités visés (énergie, industriel, transport), mais le marché du carbone tente en même temps de créer un nouveau marché de l’économie verte.
Un marché du carbone fonctionne car il partage la responsabilité des réductions des GES entre le privé et le public. Au fur et à mesure que les unités d’émission sont achetées et échangées, les prix fluctuent puis se stabilisent à un point d’équilibre. Ce nouveau point d’équilibre « naturel » reflète le coût pour réduire une tonne de CO2 et ce coût devient alors le même pour tous les gros émetteurs de GES. Donc, le secteur privé s’auto-réglemente selon le prix et il peut participer à la création de richesse. Quant au gouvernement il doit bien encadrer les entreprises et émettre le bon nombre d’unités d’émission afin d’atteindre son objectif final en 2020 qui est de 67,0 MtCO2éq. Pour ce faire le gouvernement réduira graduellement le nombre d’unités d’émission qu’il distribuera aux entreprises.
En bref, c’est la petite histoire du marché de carbone qui vient cogner à nos portes. Mais qu’en est-il des petits émetteurs (moins de 25 000 tonnes de CO2 par année) et qui produisent la part du lion des GES? Grâce aux Solutions Will, les petits émetteurs peuvent se tourner vers un marché du carbone volontaire et non réglementé. Nous verrons la différence et la complémentarité entre le Western Climate Initiative et un marché de carbone volontaire dans notre prochain blogue.
Martin Clermont, président-directeur général, Solutions Will.