La gestion des matières résiduelles évolue petit à petit, reconnaissant que l’enfouissement de ces matières est néfaste pour l’environnement et pour la santé publique.

Les innovations en termes d’équipements et en termes de modes de traitements ainsi que l’implication des citoyennes et des citoyens et des industries dans cet enjeu marquent la transition actuelle. Cependant, l’entreposage des matières résiduelles dans les lieux d’enfouissements techniques (LET) reste encore la pratique la plus utilisée au Québec [1].

13 millions de tonnes de matières résiduelles sont produites chaque année par les Québécoises et les Québécois. Le gouvernement met en place des mesures de sensibilisation et des outils pour aider la population et les industries à mieux trier leurs matières résiduelles (comme l’application mobile de RECYC-QUÉBEC), mais encore trop de produits de consommation se retrouvent enfouis dans les LET. Souvent, ces matières sont contaminées par d’autres, faute du tri sélectif efficace. Pourtant, les potentiels d’exploitation quant à la production d’énergie et de biens associées à ces matières sont notoires [2].

Le gouvernement québécois reconnait les enjeux environnementaux et économiques de la gestion des matières résiduelles et de la perte de ressources que la situation actuelle entraîne en mettant sur pied des plans d’action et des politiques aux mesures précises.

Par exemple, les entreprises doivent maintenant assumer des coûts selon la quantité de matières recyclables qu’elles produisent et les municipalités sont dans l’obligation d’ériger des plans d’actions de gestion des matières résiduelles. La Politique québécoise de gestion des matières résiduelles a maintenant été mise à jour pour l’horizon 2024. Voulant transiter vers une économie plus verte, les objectifs de ces politiques sont basés sur le principe des 3RV-E et s’appuient sur les recommandations de la Loi sur la Qualité de l’Environnement (LQE) [3]. Les buts, dans cet ordre, sont de réduire les matières résiduelles générées par les citoyens et par les industries, de promouvoir le réemploi des biens de consommation, d’effectuer le recyclage efficace des matières, de mettre d’avant le traitement biologique des matières qui le permettent, d’améliorer la valorisation énergétique des ressources et à la toute fin leur élimination.

Les politiques visent à promouvoir une circularité des ressources et d’ainsi en éviter leur gaspillage. Il reste que le meilleur déchet est celui qui n’est pas produit, d’où le but ultime de la réduction à la source. Chez Solutions Will, nous offrons une solution de financement vert pour les organisations qui réalisent des projets de réduction des matières résiduelles à la source dans leur chaine de valeur. 

Actuellement, la gestion des matières résiduelles est planifiée selon une linéarité : lorsqu’on ne veut plus d’un bien, on le jette. Le recyclage et le compostage sont mis en place, mais leur efficacité n’est pas une priorité. Ce n’est un secret pour personne, l’exportation des matières recyclables produites au Canada est davantage une pratique que le recyclage en lui-même sur le territoire. Le modèle économique du recyclage en favorise l’exportation, empêchant le développement de nouvelles technologies de traitement.

De plus, la contamination des matières recyclables, surtout par le verre brisé diminue la quantité de matières potentielles. C’est donc qu’une portion considérable de matières organiques et recyclables sont acheminées vers les LET chaque année.

Ce domaine en transition mérite une attention particulière des gouvernements. Quoiqu’il soit maintenant mieux pris en charge, il reste un travail considérable à faire. L’amélioration des secteurs de recyclage, de compostage et de valorisation énergétique peuvent détourner une quantité considérable de matières résiduelles vouées à l’enfouissement. Cela étant dit, sans la participation des citoyens et des industries au tri en amont des collectes des matières, les mesures et les efforts mis en place par les gouvernements sont complètement inefficaces.

D’ailleurs, plusieurs municipalités songent à implanter plus strictement le principe du « pollueur payeur ». Par exemple, à Gatineau, la quantité de matière jetée aux ordures est limitée par un bac d’une certaine capacité préalablement déterminée par la ville, puis des amendes peuvent être attribuées aux individus dont les ordures dépassent cette capacité [4].

Suremballage et gaspillage de ressources

Les problématiques du suremballage et des matières plastiques sont probablement à la source du défi de la gestion des matières résiduelles. Les fruits et légumes sont l’exemple le plus commun au quotidien du suremballage, mais si vous observez minimalement autour de vous, vous verrez que la quasi-totalité des produits est emballé avec du plastique. Quelle matière se trouve en majorité dans votre bac de récupération? Et dans votre poubelle?

Même si la plupart des plastiques communs sont recyclables, il reste qu’au Québec, 9% du plastique seulement est recyclé [5]. C’est donc que 91% de cette matière omniprésente est soit vouée à l’enfouissement, à l’incinération ou à l’accumulation dans l’environnement (cours d’eau, environnements côtiers, bords de routes, etc.).

Une portion considérable de la problématique est allouée au temps de résidence des plastiques dans l’environnement. Ces polymères dérivés du pétrole ont des durées de vie encore indéterminées. Ils ne disparaissent jamais vraiment de l’environnement : ils se photodégradent en particules de microplastiques. Leur dégradation excessivement lente est activée par la lumière du soleil, par la chaleur, par l’humidité et par différents facteurs environnementaux. Lorsque fragmentée en petits morceaux, la surface de contact entre les molécules de la matière plastique initiale et le milieu environnant est supérieure, induisant ainsi davantage d’échanges de produits toxiques et d’additifs chimiques.

Supportant directement l’industrie des énergies fossiles par leur production et par leur transport, les plastiques contribuent à l’augmentation des émissions de GES globales et peuvent représenter des dangers pour les écosystèmes et pour la santé humaine par leurs toxines relâchées dans l’environnement. En 2019, 300 millions de tonnes de déchets de plastiques sont produits [6]. L’utilité de ces emballages est de l’ordre de quelques minutes, alors qu’elles peuvent subsister plus de 70 ans dans notre environnement.

Les politiques québécoises ont également pour objectif d’améliorer le recyclage du verre. Cette matière recyclable à l’infini n’est absolument pas exploitée à son plein potentiel, son taux de recyclage étant de 37% [7]. Le verre pose un défi à l’industrie puisqu’il peut facilement se casser et contaminer les autres matières recyclables. De plus, il est dangereux pour les individus qui le collectent et souvent il n’est pas compatible avec la machinerie utilisée pour en faire la réutilisation. Cette ressource présente un potentiel notoire en termes de circularité des ressources, mais la façon dont elle est collectée doit être améliorée.

Émissions de GES et impacts sur la santé publique reliés à la gestion des matières résiduelles

La Communauté Métropolitaine de Montréal compte plus de la moitié de la population Québécoise et, à elle seule, contribue à 6,2% des émission de GES totaux par la production de matières résiduelles [6]. L’enfouissement des déchets, dont nous sommes encore trop dépendants, est une importante source d’émissions de GES et comporte des risques en matière de santé publique.

Regardons d’abord la situation actuelle des LET. Lorsque les déchets sont entreposés dans le sous-sol supérieur de la Terre, un liquide appelé lixiviat est produit. Ce liquide résiduel provient de l’eau des précipitations et de l’eau présente dans les déchets. La masse d’ordures contenue dans le sol constitue un milieu plus ou moins perméable qui agit en guise de route pour les particules d’eau qui la traverse. Au travers de son passage des déchets vers les couches de sol inférieures, le lixiviat se charge en polluants organiques et métalliques. Cette lixiviation contribue à la dégradation de la qualité des sols et à la contamination des nappes phréatiques puisque les polluants migrent dans le plancher terrestre [8]. Les LET doivent donc posséder les infrastructures adéquates pour traiter leurs eaux usées.

Ensuite, la décomposition des déchets dans les lieux d’enfouissement s’effectue sans oxygène par un processus biologique de fermentation. Il relâche un mélange de gaz appelé biogaz constitué principalement de méthane et de dioxyde de carbone. Formant les principaux gaz à effet de serre contribuant aux changements climatiques, ce mélange doit être capté avant son relâchement dans l’atmosphère. Lors de sa captation, il peut être brûlé sur son lieu de production pour fabriquer de la chaleur et de l’électricité ou il peut être purifié pour fabriquer du biométhane utilisable comme gaz naturel. Généralement, il est capté, puis brûlé et relâché dans l’atmosphère puisque les coûts reliés à la biométhanisation sont trop élevés.

Le processus de combustion transforme le méthane en dioxyde de carbone, mais 25% du méthane n’est pas capté, se diffusant dans l’atmosphère [9]. Le méthane est un gaz à effet de serre 25 fois plus puissant que le dioxyde de carbone sur une période de 100 ans. C’est donc qu’une molécule de méthane équivaut à 25 molécules de dioxyde de carbone pour 100 ans dans l’atmosphère [10].

Quoique le biogaz a un potentiel de valorisation énergétique important, il n’est pas exploité à son maximum. S’il était reconditionné en énergie verte, assurant ainsi la circularité des ressources, il pourrait compenser les émissions de GES émis par les sites d’enfouissement. Les coûts reliés à ces installations et la quantité de matière organique requise pour en produire de l’énergie est notoire. C’est pourquoi le compost est priorisé par rapport à la valorisation énergétique.

Les risques pour la santé publique liés aux sites d’enfouissement ne sont pas négligeables. La contamination des cours d’eau et des nappes phréatiques environnantes, la contamination de l’air ambiant par le biogaz et l’exposition potentielle des populations à ces polluants entraînent l’augmentation des possibilités de cancer, d’intoxications chroniques et des problématiques durant les grossesses [11].

En contrepartie, le compostage de la matière organique a un potentiel d’atténuation des émissions de gaz à effet de serre. La décomposition de la matière organique dans le cas du compost se fait en présence d’oxygène et de micro-organismes. Le procédé relâche seulement du dioxyde de carbone biogénique et les procédés de compostage séquestrent le carbone au sol. Ce procédé naturel est donc carbo-neutre [9].

Il ne s’agit plus de voir les matières résiduelles comme des déchets. Elles présentent de véritables potentiels énergétiques et de reconduction de la matière recyclable. Une amélioration des techniques de recyclage, une utilisation du compost à plus grande échelle et une valorisation des biogaz davantage priorisée permettraient la réduction des émissions de gaz à effet de serre, pour assurer la circularité des ressources, pour alléger les risques reliés à la santé et pour créer des emplois sur le territoire Québécois.

La réduction de la quantité de matières résiduelles produite est clé pour réussir à en faire une meilleure gestion. Consommer moins, réutiliser plus et jeter le moins possible sont les lignes directrices à suivre pour un quotidien moins pollué.

Alexie Roy-Lafontaine

Alexie Roy-Lafontaine

Rédactrice scientifique pour le web et les réseaux sociaux

Autrice de l’article